Le Collège des médecins s’est entendu avec les physiothérapeutes pour leur permettre dans un horizon d’un an de prescrire eux-mêmes des radiographies, essentiellement en cas de soupçon de fracture. Le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, reste sur son quant-à-soi pour l’instant.
Après avoir donné de la latitude aux pharmaciens et aux infirmières, le Collège des médecins a accepté en conseil d’administration, le 20 octobre, que les physiothérapeutes puissent prescrire des radiographies « pour des conditions aiguës et traumatiques du système musculo-squelettique », indique en entrevue téléphonique Denis Pelletier, physiothérapeute et président de l’Ordre professionnel de la physiothérapie.
Cette entente vise aussi bien les physiothérapeutes qui travaillent dans le réseau public que ceux qui travaillent dans le réseau privé, précise-t-il.
M. Pelletier estime que cet accord « évitera aux gens jusqu’à 12 heures d’attente aux urgences », dans la mesure où une fracture à un bras ou à une jambe n’est pas en haut des priorités quand on se présente à l’hôpital.
Le Collège des médecins est convaincu que cette ouverture « peut faire une grande différence pour les patients, car ils auront un accès plus rapide à des radiographies », suivant des lignes directrices très précises calquées sur celles du Collège américain de radiologie, a précisé Leslie Labranche, relationniste de presse du Collège des médecins.
Barrette pris de court
Plutôt que d’aller aux urgences, on pourra donc dans un an aller chez le physiothérapeute pour obtenir d’emblée une prescription de radiographie ? Advenant une fracture, les gens pourront donc choisir d’aller chez le physiothérapeute, s’ils en ont la possibilité, plutôt qu’aux urgences ? Oui, nous répond-on aussi bien au Collège des médecins qu’à l’Ordre des physiothérapeutes.
Le physiothérapeute ne pourra pas poser de diagnostic, mais il pourra prescrire une radiographie après la mise en place d’un corridor de services, précisent les deux ordres professionnels.
Coup de fil au cabinet du ministre de la Santé pour avoir ses commentaires. Surpris, Gaétan Barrette, qui n’avait pas vu l’entente, a illico appelé au Collège des médecins pour en savoir davantage.
Le Dr Barrette nous est revenu ensuite, disant qu’il n’a pas « à porter de jugement sur cette entente entre les deux ordres » qui, selon ce qu’il en comprend, se veut comparable à celle des infirmières praticiennes qui travaillent directement avec des médecins.
Mais d’aucune façon « on ne va voir un physiothérapeute pour ça [une fracture] », insiste le docteur Barrette qui ajoute qu’il ne saurait être question d’une mise en place « d’un nouveau réseau parallèle » dans lequel le physiothérapeute pourrait prescrire isolément des radiographies dans son cabinet privé.
Or, à l’heure actuelle, 18 000 personnes attendent de voir un physiothérapeute du réseau public, selon une étude menée par Kadija Perrault et des collaborateurs, basée sur des données des 97 centres hospitaliers du Québec.
Il faut donc payer généralement entre 80 et 100 $ pour voir en cabinet privé un physiothérapeute qui, le plus souvent, travaille en vase clos.
Entente à entériner
Le Dr Jean-Bernard Trudeau, secrétaire général adjoint du Collège des médecins, l’admet : l’entente « crée une ouverture pour amener médecins et physiothérapeutes à mettre en place des partenariats et un corridor de services ».
Ce « corridor de services » reste toutefois à être mis en place et il faudra voir à quel point il devra être étroit.
Pour avoir le droit de prescrire certaines radiographies, les physiothérapeutes devront-ils être physiquement dans le même cabinet que le radiologiste et le médecin de famille ? Dans le même groupe de médecine de famille ?
L’entente doit d’abord être soumise à l’Office des professions du Québec, qui publiera un projet de règlement dans la Gazette officielle. S’ensuivra une consultation de 45 jours au cours de laquelle les commentaires des personnes intéressées seront entendus.
Le ministre de la Santé pourra y participer et, ultimement, il reviendra d’ailleurs au gouvernement d’entériner l’entente ou non.
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